Henry Bauchau est né en 1913 en Belgique. Qu'il soit poète, dramaturge et psychanalyste c'est en tant que romancier que Bauchau excelle. Après la guerre, engagé dans la résistance, il découvre la psychanalyse qui occupe une place importante dans ses œuvres. Il enseigne également l'Histoire de l'Art en Suisse. C'est seulement à 45 ans qu'il connaît la consécration littéraire avec la publication d’Œdipe sur la Route en 1990.
Comme Sophocle, Bauchau à fait d’Œdipe le personnage d'une trilogie. Œdipe sur la Route est le deuxième roman.
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Henri Bauchau s’intéresse à un épisode délaissé par la légende : de quoi ont été constituées les années d'errance d’Œdipe ? C'est un récit d'errance, ou l'ancien roi doit affronter ses démons, jusqu'à atteindre la clairvoyance, la connaissance et l'acceptation de son être, de son identité et de sa destinée.
Œdipe sur la route fut une œuvre très importante dans la littérature de Bauchau. Son succès s'explique par le fait que l'auteur reprend le thème mythologique et tragique d’Œdipe de Sophocle.
Œdipe s'est crevé les yeux après le suicide de sa femme et mère Jocaste. Le roman débute lorsque Œdipe est déjà aveugle, un an après le drame. Accompagné d’Antigone, il part en quête de leur identité. Lors de son chemin il rencontre des hommes et des femmes, qui, comme eux sont à la recherche de leur destin et donnent à l'aveugle le réconfort dont il a besoin.
Le roman traite la quête d'identité des personnages en mêlant les genres littéraires et le roman initiatique. L'originalité de l'auteur vient sans doute de l'Art très présente dans le roman. La voie d’Œdipe est étroitement liée à la danse, au chant, la sculpture, etc. qui jouent le rôle de catharsis. Les batailles ressemblent plus à des chorégraphies, on trouve des clans, comme celui du chant, de la flûte et celui de la danse. Les deux sont incapables de s'entendre.
L'originalité de Bauchau vient aussi de ses personnages plus « lumineux » que ceux de Sophocle. De plus ils sont très humains, capable de comprendre son prochain, ils sont remplies de failles, ils souffrent de faim, de soif, de froid, aiment, haïssent, etc. Des sentiments plutôt rare chez Œdipe roi de Sophocle. On assiste aussi à l'évolution de la relation entre Antigone et Œdipe. Une relation entre retenue, tendresse et protection. Le duo père fille, rencontre Clios, qui devient leur compagnon de route, il est d'abord un meurtrier et violeur, mais après une bataille où Œdipe gagne, il devient le guérisseur, l’homme de bon conseil.
Chaque personnage ou lieu permet à Œdipe de se retrouver, de découvrir sa véritable identité. Mais c'est surtout grâce à l'Art notamment la sculpture. Les trois amis représentent un falaise en forme de vague, pour Œdipe, c'est une véritable révélation. Antigone est un personnage complexe, perdu dans l'adolescence, l'amour fraternel et le désir, notamment pour Clios au début. Mais elle est aussi le symbole de la résistance comme chez Sophocle, elle n'abandonne jamais son père en surmontant toutes les épreuves avec lui.
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Ainsi, l'art tente de rivaliser avec le destin. Le voyage d’Œdipe à le rôle de thérapie, l'art lui permet de se libérer de ses chaînes notamment lorsqu'il trouve son talent de sculpteur.
« L’Art est un anti-destin »
Virginie Brinker
L'art comme « anti-destin » selon Malraux :
Pour combattre « l’absolue réalité de la mort », il n’y a en fait qu’une solution. Plus que l’aventure, le combat ou l’engagement, c’est l’art : « L’art est un anti-destin ». En effet, l’art est ce par quoi l’homme peut défier le temps, et accéder à l’éternité. L’art, sous toutes ses formes, de la préhistoire à nos jours, est toujours, selon Malraux, l’angoisse de la mort vaincue par le désir d’embrasser le cosmos. C’est pourquoi Malraux compose pour lui-même un « musée imaginaire », où il recueille l’héritage des siècles passés et des civilisations disparues.
Cécile Lière